LE CARACTERE ABUSIF DE LA CLAUSE DE MEDIATION OBLIGATOIRE DANS LES CONTRATS DE CONSOMMATION
« La clause qui contraint le consommateur, en cas de litige, à recourir obligatoirement à une médiation avant la saisine du juge, est présumée abusive, sauf au professionnel à rapporter la preuve contraire » (Cass. Civ. 1e, 16 mai 2018, n°17-16.197).
Par un arrêt rendu le 16 mai 2018, la Cour de cassation a condamné les clauses de médiation obligatoire dans les contrats de consommation en se plaçant sur le terrain des clauses abusives.
En l’espèce, des consommateurs avaient assigné en 2014 un professionnel du tourisme.
Ce dernier avait soulevé l’irrecevabilité des demandes des consommateurs, en se prévalant d’une clause du contrat imposant une médiation préalable et obligatoire avant toute action en justice.
Cette argumentation avait été accueillie par la cour d’appel de Versailles.
Il est vrai qu’en principe, la clause d’un contrat instituant une mesure de conciliation ou de médiation obligatoire et préalable à la saisine du juge constitue une fin de non-recevoir (Cass., Ch. Mixte, 14 février 2003, n°00-19.423).
La portée de ce principe a néanmoins été restreinte par la Cour de cassation qui a notamment jugé que de telles clauses ne s’appliquent pas aux actions visant à obtenir des mesures d’instruction (Cass., Civ. 3e, 28 mars 2007, n°06-13.209).
L’arrêt commenté apporte une nouvelle restriction à ce principe en ce qui concerne les contrats de consommation.
La Cour de cassation considère en effet que de telles clauses de médiation obligatoire et préalable constituent des « clauses présumées abusives » (ou « clauses grises »).
Cette solution est conforme à l’article R.212-10° du code de la consommation qui prévoit que sont présumées abusives les clauses ayant pour objet ou pour effet de « supprimer ou entraver l’exercice d’actions en justice ou des voies de recours par le consommateur, notamment en obligeant le consommateur (…) à passer exclusivement par un mode alternatif de règlement des litiges ».
La portée de l’arrêt est néanmoins limitée.
L’article L.612-4 du code de la consommation (entré en vigueur en novembre 2015 après les faits de l’espèce et donc inapplicable) dispose dorénavant qu’ « est interdite toute clause ou convention obligeant le consommateur, en cas de litige, à recourir obligatoirement à une médiation préalablement à la saisine du juge ».
Les consommateurs n’ont donc plus besoin d’invoquer les dispositions sur les clauses présumées abusives qui donnent la possibilité au professionnel de rapporter la preuve contraire.
Il est aujourd’hui incontestable que la médiation de la consommation doit rester un droit pour le consommateur et ne peut lui être imposée.
Christopher KOENIG
Avocat à la Cour
Membre médiateur de l’entité de médiation AME CONSO
Angela ALBERT
Avocat et Médiateur
Présidente de l’Association des Médiateurs Européens
(Centre de Médiation du Barreau de Paris)